La ville marchande de Chambar, au sud-est du Pakistan, sert de centre financier à 2 400 fermiers des villages environnants.
Au début de la saison de plantation du kharif1 en avril, quand ils sèment du coton et d’autres cultures, ils achètent des facteurs de production (des engrais, des outils, la force de travail). Étant donné que plusieurs mois se sont écoulés depuis la vente de leur dernière récolte, leur seul moyen d’effectuer ces achats est d’emprunter en s’engageant à rembourser lors de la prochaine récolte. D’autres fermiers empruntent afin de payer des médicaments ou des médecins. En revanche, peu d’entre eux ont un jour franchi les portes éclatantes de verre et d’acier de la JS Bank sur la rue Tando Allahyar. Ils se rendent plutôt chez l’un des quelque 60 prêteurs non institutionnels.
S’ils cherchent à obtenir un prêt pour la première fois, ils sont attentivement interrogés par l’usurier, qui demande des références venant des autres fermiers qu’il connaît. Dans la plupart des cas, ils reçoivent un petit prêt d’essai permettant d’évaluer leur solvabilité.
L’usurier vient alors généralement rendre visite au fermier afin d’évaluer la qualité de ses terres, de ses animaux et de son équipement.2
Les prêteurs non institutionnels sont méfiants. En effet, si le fermier fait face à une mauvaise récolte, le prêteur perd de l’argent. De plus, contrairement à de nombreuses institutions financières, les prêteurs non institutionnels n’exigent généralement pas du fermier de garantie (hypothèque, gage) qui deviendrait la propriété du prêteur dans le cas où le fermier ne serait pas en mesure de rembourser le prêt – par exemple, une partie ou la totalité de sa propriété, ou encore des bijoux en or.
En partie grâce à la sélection rigoureuse effectuée par les usuriers prêteurs, les défauts de paiement (le non-remboursement) sont rares : moins d’un fermier sur trente ne parvient pas à rembourser. En comparaison, les défauts sur les prêts octroyés par les banques commerciales sont bien plus fréquents, à raison d’un sur trois. La capacité des usuriers à éviter les défauts de paiement repose sur leur évaluation précise de la confiance qu’ils peuvent accorder à leurs clients.
1 Les cultures kharif (ou cultures de mousson) sont des cultures semées et récoltées pendant la saison des pluies (mousson) dans l’Asie du Sud, qui s’étend du mois d’avril au mois d’octobre.
2 Irfan Aleem, The World Bank Economic Review 4 (3) : pp. 329–349, 1990.
Source : https://lesmanuelslibres.region-academique-idf.fr Télécharger le manuel : https://forge.apps.education.fr/drane-ile-de-france/les-manuels-libres/ses-premiere-specialite ou directement le fichier ZIP Sous réserve des droits de propriété intellectuelle de tiers, les contenus de ce site sont proposés dans le cadre du droit Français sous licence CC BY-NC-SA 4.0